1999
J'ai 9 ans, je la rencontre pour la première fois je crois. Soirée chez ma meilleure amie de l'époque, je me blesse à l'arcade. Il y a beaucoup de sang. Je crois que ça va aller. Je me couche. Les émotions me submergent littéralement. J'appelle à l'aide, j'ai besoin de rentrer.
Je dormirai lumière allumée pendant des mois. Je ne pourrais dormir ailleurs que chez moi encore plus longtemps.
2015
Départ pour l'aventure d'expat en Irlande. Je vais à l'encontre de mon cerveau et de mon cœur, un soir de février dans ce nouveau pays, en faisant ce que je ne souhaite pas faire au fond de moi. Raisonnement idiot pour soigner le coeur. On est irrationnels quand on est malheureux. Elle revient alors que je l'avais oubliée. Elle est plus forte. J'ai l'impression que je vais mourir, je me sens oppressée, mon cœur, mes poumons. Je n'ai plus assez d'air. Je dois sortir. Et l''anxiété finit par repartir au petit matin, peut-être trop vite finalement pour que je prenne réellement conscience de la douleur que c'est de la ressentir. Je l'oublie.
2019
Dans le salon de la maison de mes parents, mon papa fait un malaise. Le genre de malaise où tu crois que c’est terminé. Mais on a de la chance, il est toujours là. Cependant, alors qu'on suit le camion des pompiers, mon corps défailli à son tour ce jour là, j'ai l'impression que je ne peux plus respirer. Cette fois-ci l'air ne passe carrément plus. Je vais mourir. La crise se calme. Elle reprend dans la salle d'attente, puis se calme. Elle reprend la nuit. Elle se calme. Elle reprend au petit matin.
L'anxiété est là, elle s'installe dans ma vie. D'une crise quotidienne, a une crise hebdomadaire, une crise mensuelle, des moments de sentiments mitigés, une crise occasionnelle. Mais elle ne repart pas vraiment. Jamais. Avant de le vivre jamais je n'aurais pu l'imaginer, ni deviner.
L'anxiété c'est être en hyper vigilance en permanence.
L'anxiété c'est lors d'une crise penser réellement qu'on est sur le point de mourir.
L'anxiété c'est appréhender de se coucher pour certains, appréhender des événements pour d'autres.
L'anxiété elle t'épuise.
L'anxiété c'est interpréter les signes que t'envoie ton corps, parfois comme signes d'une maladie grave.
L'anxiété t'amène à vouloir vérifier régulièrement que tu vas bien.
L'anxiété te fait toujours penser au pire.
L'anxiété te réveille la nuit, on t'empêche de t'endormir avec ses punaises de palpitations cardiaques.
Bref, tu l'auras compris, c'est pas ouf.
Pour t'expliquer encore mieux, si on me donnait le choix entre ma RCH (et oui bingo, on m'a diagnostiqué une recto colite hémorragique à mes 18ans) et mon anxiété, sans hésiter je demanderais à ce qu'on reprenne l'anxiété.
Elle est parasite. Elle est sournoise. Et toujours en fond.
Elle m'a poussé à réduire la caféine, la théine et tout ce qui pouvait être excitant mais que j'aimais tant.
Elle a fini par me rejoindre quasi quotidiennement dès que je buvais de l'alcool, peu importe la quantité.
Reiki. Sophrologie. Naturopathie. Réflexologie plantaire. Magnétisme. Sophrologie. J'ai tout essayé pour la faire repartir plus vite. La Sophrologie a fini par m'aider à accepter qu'elle ne repartirait pas comme ça.
Depuis plus d'un an, je fais une fois par mois une séance d'EMDR, une méthode en psychologie pour soigner les personnes ayant vécu un traumatisme. Et j'avance.
Finalement il y a tellement de traumatismes dans une vie qui amènent à ce que l'anxiété s'installe, que tous les identifier, les soigner, prend du temps, énormément de temps.
A raison d'une dizaine de traumas identifiés (et oui sinon ce n'est pas drôle, il y a aussi ceux dont on n'a pas conscience), de quasi un trauma en 3 séances... 1 séance par mois... Je te laisse calculer. Mais au moins, j'ai l'impression d'avancer d'avoir de nouvelles armes qui me préparent à l'éventualité qu'un jour, un événement aussi compliqué puisse m'arriver de nouveau, mais cette fois ci en ayant la possibilité de réagir différemment.
Mon anxiété elle est silencieuse. Très peu m'ont vu faire une crise. La nuit quand elle m'empêche de trouver le sommeil, je reste seule avec les exercices de respiration, à apaiser cette peur de mourir. Très peu savent, car tu te sens idiote une fois les crises passées, et surtout très peu peuvent comprendre. Et puis j'ai un caractère fort comme ils disent, toujours le sourire, alors tu ne peux pas deviner. Personne finalement mise à part ceux qui ont déjà fait une crise d'angoisse peuvent savoir à quel point c'est irrationnel.
Finalement j'ai décidé de carrément arrêter l'alcool, c'était le dernier provocateur de crises régulières. Et ça m'a soulagée. Je finissais par appréhender les moments de fête (et ceux qui me connaissent savent à quel point je suis à l'opposé de ça, à quel point j'aime passer des moments en famille et entre amis). Je suis loin d'être introvertie. Je n'ai pas besoin de ça pour rire, danser et m'amuser, c'est une chance, et je suis heureuse d'avoir su me le rappeler. Aujourd'hui, les crises sont donc et faibles en intensité et beaucoup plus rares.
Si je te parle de tout ça, ce n'est pas un exercice de thérapie in, mais parce qu'il y a quelques semaines nous avons cru que je faisais un AVC. En 24h, le côté droit de mon visage s'est peu à peu paralysé. Et alors que lorsqu'il s'agit de mon fils, de mon entourage, mon hyper vigilance m'amène, à juste titre, à toujours aller vérifier auprès d'un médecin que tout va bien, pour moi j'ai cru que c'était mon anxiété qui me faisait exagérer cette impression de paralysie.
J'ai attendu 24h. Heureusement ce n'était "qu'un hématome" dû à une sinusite + otite qui appuyé sur le nerf de mon visage. Heureusement en 5 jours sous cortisone, tout est rentré dans l'ordre. Heureusement.
24h pour un AVC ça aurait été trop. Je me rassure en me disant que si ça avait été plus grave je l'aurais su, j'aurais réagi. La réalité c'est que je ne sais pas et que clairement je ne me suis ni écouté ni fait confiance. A force de me répéter pendant les crises que ça allait, que j'imaginais, je créais ces signaux, j'ai fini par ne pas écouter les vrais.
Alors aujourd'hui, c'est à toi qui fait aussi de l'anxiété que je m'adresse : tu n’exagères pas, tu ressens. J'ai tellement tellement envie de te dire de t'écouter, de te faire confiance. Et je sais à quel point c'est difficile. Si quelque chose, ne te semble pas normal alors consulte un médecin, appelle le SAMU, ce sera toujours mieux que de rester dans le doute.
Cette anxiété, qui provoque cette hypervigilence peut finalement être un atout, ne la laisse pas devenir une faiblesse et te mettre en danger.
Tu comptes,
Tu avances,
Tu n'es plus la personne d'hier, tu as de nouvelles armes alors la prochaine fois, tu réagiras autrement.
Ça va aller,
Et si tu veux en parler je suis là,
Elo🌻
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